De l’enfance à l’adolescence, d’un univers à un autre, ce passage déchaîne une série de questionnements chez les adolescents et les adolescentes, qui cherchent à façonner leur identité tout en vivant des changements cruciaux.
Avec la poussée de la croissance et la puberté, les regards envers ce corps en mutation se transforment également. Garçons, filles ou personnes non binaires, chacun et chacune est sujet à cet étrange rapport à soi qu’entraîne l’adolescence, la confrontation à ses camarades, aux standards et aux idéaux liés au genre.
À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes célébrée le 8 mars prochain, j’ai questionné les jeunes adolescentes fréquentant la maison des jeunes au sujet de la féminité, de leurs visions, de leurs difficultés et des défis qu’elles rencontrent durant cette période charnière.
Pour des raisons légales, les noms ne sont pas divulgués.
Ce texte est un extrait de leurs différents témoignages.
Comment trouvez-vous le passage de l’enfance à l’adolescence? Vivez-vous des difficultés particulières?
« Je le trouve difficile, nous ressentons beaucoup de pression à vieillir rapidement. Nous ressentons l’attente que nous devons déjà être des adultes alors que nous sommes encore des enfants. À la maison, je suis responsable de mes frères. Je joue le rôle de la mère. »
« J’aurais aimé avoir plus d’accompagnement afin de mieux comprendre mon corps et ses changements. Je me rends compte que c’est complexe et je ressens beaucoup plus les standards de beauté. Nous sommes plus observées et jugées en fonction de notre physique et selon si nous collons parfaitement à un idéal ou non. Malheureusement, j’ai développé un inconfort avec les garçons. »
« Au tout début, c’était facile, ça paraissait comme un rêve, mais dès que l’on entre réellement dans cet univers, on s’y perd. On nous dit que nous devons être matures et donner l’exemple, mais personne ne nous y a préparées concrètement. J’ai l’impression que les filles ou les femmes reçoivent plus de pression et de jugements comparativement aux garçons. Pour ce qui est des difficultés, ce que j’ai trouvé difficile, et encore à ce jour, c’est l’acceptation de mon corps. Depuis mes 7 ans, je ne me suis jamais sentie à l’aise. Trop grosse, trop grande, trop ceci ou trop cela. Lorsque mon corps a entamé son processus de changement, j’ai commencé à me comparer aux autres et à développer une mauvaise image de moi-même. »
Quels sont vos espoirs pour les femmes?
« Moins de préjugés et moins de pression sur nous! Nous sommes toutes différentes et belles à notre façon. J’aimerais pouvoir m’habiller sans être jugée. »
« J’aimerais voir plus de solidarité entre nous, ce n’est pas normal que nous puissions être méchantes les unes envers les autres et faire la compétition. C’est déjà difficile d’être une fille aujourd’hui, pourquoi s’en rajouter? »
« Pour le futur, j’espère que les femmes pourront être plus respectées et qu’elles seront moins jugées sur leur apparence, car d’après moi c’est un problème beaucoup trop commun dans notre société. »
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Nous avons longuement discuté, les jeunes et moi. Je tiens à souligner ma reconnaissance envers elles pour leurs témoignages sensibles et courageux. À l’adolescence comme à l’âge adulte, les femmes traversent une multitude de difficultés et d’oppressions liées à leur genre. Ces témoignages me rappellent que malgré les luttes entreprises, celles-ci doivent se poursuivre quotidiennement afin que l’espoir se transforme et qu’il ne soit pas simplement qu’un espoir, mais une totale réinvention de nos rapports, de nos visions et de nos comportements. Je souhaite à toutes les femmes de poursuivre leurs luttes, de résister, d’être belles et bruyantes, et que la Journée internationale des droits des femmes ne demeure pas qu’une seule journée, mais soit un acte et un symbole du quotidien.